L’histoire de la Suisse est celle d’une ligue défensive médiévale formée à une époque et dans une région dépourvue d’autorité impériale. Les différents cantons (traditionnellement appelés Orte en allemand) étaient dans une large mesure des États indépendants qui sont restés unis par la défense commune de la liberté, qui était comprise comme la protection des privilèges et des franchises impériales. Contrairement à toutes les confédérations similaires (par exemple, les ligues hanséatiques et souabes) et malgré des conflits internes endémiques, surtout après la Réforme au XVIe siècle, la Confédération helvétique a survécu à la formation des États modernes (princiers) sans s’y adapter. Avec Venise, Gênes et les Pays-Bas, la confédération a formé l’exception républicaine en Europe, et elle a développé des structures politiques moins en tant que nation unifiée qu’au niveau des 13 cantons que comptait la Confédération suisse au moment de la Réforme. La confédération des débuts de l’ère moderne comprenait également, avec un droit de parole réduit, les Zugewandte Orte, des districts et des villes (comme Genève et les Grisons) qui étaient alliés à la confédération et en sont devenus par la suite partie.
La Suisse a été (avec Saint-Marin) la seule république des débuts de l’ère moderne à survivre au règne de Napoléon Ier. Elle a modernisé ses structures politiques dans sa constitution de 1848, adoptant avec succès les principes libéraux tels que les droits individuels, la séparation des pouvoirs et le bicamérisme parlementaire consacrés par la Révolution française (1789) et la Constitution américaine. Au cours de la période de crise qui a précédé, de la fin du XVIIIe siècle au milieu du XIXe siècle, la confédération a intégré les cantons francophones et italophones ainsi que de vastes zones rurales, qui étaient auparavant sous la domination de régimes oligarchiques ou démocratiques. Ainsi, la Suisse a évité de se briser comme d’autres États traditionnels situés sur des crêtes montagneuses, tels que la Navarre ou la Savoie, qui ont été détruits par l’idée de « frontières naturelles », ou l’empire des Habsbourg, qui a fini par être déchiré et réduit à son élément allemand par les partisans du nationalisme. Produit de l’équilibre des forces en Europe et, après 1499, attaquée une seule fois (1798), la Suisse a connu la paix pendant la majeure partie de son existence et a été épargnée par deux guerres mondiales au XXe siècle, lorsque le concept de « neutralité armée », qui s’est progressivement développé, a été respecté par ses voisins. La prospérité économique a largement suivi, car la Suisse s’est bien adaptée à la révolution industrielle et à la croissance des marchés financiers internationaux, malgré des troubles sociaux internes dans les décennies du tournant du 20e siècle.
La Suisse avant la confédération
Jusqu’à la fin du Moyen Âge, le territoire constituant la Suisse moderne n’a jamais formé une seule unité politique ou culturelle. Les premiers outils en pierre découverts en Suisse datent de plus de 250 000 ans, et les premiers établissements de chasseurs humains de Néandertal remontent à environ 50 000 ans avant notre ère. Pendant la dernière période glaciaire de l’Europe alpine, le stade Würm, qui a commencé il y a environ 70 000 ans, le pays était recouvert de glace, profonde de plusieurs milliers de pieds, qui descendait des Alpes. Des figures d’animaux gravées sur des bois et des os (par exemple, celles trouvées à Kesslerloch datent d’environ 10 000 ans avant notre ère) prouvent que pendant les périodes interglaciaires, les chasseurs nomades avaient des camps dans les grottes des zones libres de glace du Jura et du Mittelland et suivaient leurs proies, principalement des rennes et des ours, dans les vallées de haute montagne. Vers la fin du Würm, vers 12 000 bce, l’Homo sapiens est apparu ; après la fonte des glaciers, les cultures néolithiques ont établi la culture du maïs et l’élevage dans certaines parties des vallées du Rhône et du Rhin (vers 5000 bce). A partir de 1800 bce environ, des établissements de l’âge du bronze sont disséminés dans le Mittelland et les vallées alpines.
Suisse celtique
Pendant l’âge du fer, à partir de 800 bce environ, la région qui allait devenir la Suisse était habitée par les Celtes à l’ouest et les Raëtiens à l’est. Une frontière approximative entre ces tribus s’étendait du lac de Constance au San Bernardino en passant par la vallée de la Linth. Une grande partie de ce que l’on sait aujourd’hui sur les Celtes en Europe occidentale pendant la période allant de 400 à 50 ans avant Jésus-Christ a été reconstituée à partir d’informations et d’artefacts glanés lors de fouilles au campement de La Tène, près de la ville moderne de Neuchâtel. Les Celtes étaient connus pour leur travail du métal, leurs céramiques originales et leurs superbes bijoux en or. Ils ont d’abord vécu dans des fermes isolées ou dans des villages (d’environ 400 habitants, selon César), puis ils ont établi des villes plus importantes (oppidum). La plupart des villes du Mittelland suisse et des vallées alpines transversales ont été colonisées à l’origine par des Celtes.
Les Helvètes, l’une des plus puissantes des tribus celtiques, contrôlaient une grande partie de la région située entre le Jura et les Alpes. En raison des pressions exercées par les tribus germaniques, ils ont tenté d’émigrer vers le sud-ouest de la Gaule en 58 av. J.-C., mais les Romains leur ont refusé l’autorisation. Vaincus par Jules César à Bibracte (actuel Mont Beuvray, France) lors de la campagne d’ouverture de la Guerre des Gaules, les survivants helvètes retournèrent sur leurs terres suisses en tant qu’alliés dépendants mais privilégiés (foederati) de Rome et comblèrent ainsi un vide qui, sinon, aurait pu précipiter un nouvel empiètement germanique.