Potentiel évoqué

BASIQUE DES POTENTIELS ÉVOQUÉS

Les potentiels évoqués sont simples dans leur concept, malgré la sophistication de l’équipement utilisé. Tout comme l’électroencéphalogramme (EEG) enregistre l’activité électrique spontanée du cerveau (cortex cérébral), les potentiels évoqués enregistrent les potentiels électriques produits après stimulation de voies neurales spécifiques. Les potentiels évoqués les plus couramment utilisés sont ceux produits par la stimulation du système sensoriel, les potentiels évoqués sensoriels. La stimulation du tractus sensoriel initie une volée électrique qui se rend jusqu’au cortex cérébral et peut être mesurée à plusieurs endroits le long des trajets neuronaux concernés.

Le tracé enregistré de la tension en fonction du temps présente un artefact initial représentant la stimulation du tractus, suivi de la réponse neuronale, qui est enregistrée sous la forme d’une série de pics et de vallées (figure 7-1). Les pics peuvent être positifs ou négatifs (par rapport à l’électrode active) et peuvent être tracés vers le bas ou vers le haut, selon la convention. On pense que les pics (et les creux) proviennent de générateurs neuronaux spécifiques (souvent plusieurs structures neuronales), de la même manière que les pics d’un électrocardiogramme qui suivent une réponse déclenchée par un stimulateur cardiaque. Les informations enregistrées sont généralement l’amplitude (du pic au creux adjacent) et le temps écoulé entre la stimulation et le pic (appelé latence) (voir figure 7-1). En outre, le temps entre les pics (latence inter-pics ou temps de conduction) peut être mesuré. Les pics sont généralement nommés par convention-I à V, Pa, Pb-ou par polarité et latence-P (positive) ou N (négative) suivie de la latence en millisecondes (msec) (par exemple, N20).

Lorsque la réponse est importante par rapport au bruit de fond, une seule mesure ou réponse peut être suffisante. Cependant, pour la plupart des réponses sensorielles, la réponse évoquée est très faible (1 à 2 microvolts) par rapport à l’EEG (50 à 100 microvolts) et à l’électrocardiogramme (1 000 à 2 000 microvolts), beaucoup plus importants. Comme les signaux sont souvent petits, un amplificateur réduit le bruit électrique en soustrayant le signal d’une électrode de référence de l’électrode d’enregistrement. Le filtrage de ce signal et la réduction supplémentaire du bruit dans une troisième électrode de masse permettent de se concentrer sur la réponse évoquée qui nous intéresse. Comme la réponse évoquée se produit toujours à un moment donné après la stimulation, le calcul de la moyenne des réponses augmente la réponse verrouillée dans le temps, tandis que l’activité de fond agit comme un signal aléatoire et s’annule. Le nombre de réponses dont on fait la moyenne varie de un à plusieurs milliers, selon le rapport entre la réponse évoquée et le bruit de fond.

Le temps nécessaire à ce moyennage du signal peut être suffisant pour retarder le retour d’information rapide au chirurgien. Pour résoudre ce problème, certaines techniques de surveillance novatrices sont employées. Dans certains cas, les nouvelles réponses sont moyennées avec les moyennes enregistrées précédemment (par exemple, moyenne mobile). Plus fréquemment, les stimuli sont décalés de sorte que la deuxième réponse ne chevauche pas la première (par exemple, les SSEP du nerf tibial postérieur gauche puis droit).

Une surveillance peropératoire efficace nécessite l’enregistrement des réponses pour déduire la santé fonctionnelle des trajets neuronaux impliqués. L’objectif de la surveillance est d’identifier rapidement une compromission neuronale imminente, afin de permettre une intervention permettant d’éviter une lésion permanente. Cet objectif nécessite une identification préopératoire du type et de l’emplacement du tissu neural susceptible de subir des lésions vasculaires et mécaniques pendant l’opération. Sur la base de ces informations, l’équipe de surveillance choisit les potentiels évoqués les plus appropriés pour surveiller ces lésions. Les potentiels sont ensuite surveillés pendant l’opération afin d’identifier le début d’une agression, qui est signalée par une diminution de l’amplitude et une augmentation de la latence. En plus de la surveillance de l’insulte opératoire, les réponses évoquées peuvent être utilisées pour des tests diagnostiques pendant la chirurgie, permettant une prise de décision opératoire éduquée (par exemple, bord de la tumeur et du tissu neural fonctionnel) ainsi que l’identification de problèmes non chirurgicaux qui peuvent avoir besoin d’être corrigés (par exemple, blessure du plexus brachial liée au positionnement).

Lorsqu’une réponse évoquée change, l’environnement physiologique, anesthésique et chirurgical doit être évalué pour déterminer sa contribution au changement. L’ischémie produit généralement une perte de réponse, en particulier si des composants synaptiques sont impliqués. En général, la tolérance à l’ischémie (c’est-à-dire le délai avant une lésion irréversible) est directement liée au débit sanguin résiduel et inversement à la demande métabolique du tissu. Heureusement, la réponse évoquée est modifiée à un niveau de débit sanguin bien supérieur à celui qui produit une lésion irréversible. Par conséquent, à moins que la lésion ischémique permanente ne soit très grave, il est généralement possible d’intervenir avant que des lésions permanentes ne se produisent. Des études suggèrent qu’une perte lente de l’amplitude de la réponse (et une augmentation de la latence) peut être due à une ischémie diffuse. Les pertes rapides (avec une modification minimale de la latence) peuvent être dues à une lésion mécanique ou à une ischémie localisée, en particulier dans la matière grise.1,2 En règle générale, une réduction de l’amplitude de 50 % ou une augmentation de la latence de 10 % d’un potentiel évoqué est considérée comme significative, bien que des changements plus faibles puissent indiquer une atteinte imminente. L’expérience de l’équipe de surveillance est essentielle pour une surveillance efficace et pour juger du moment où il faut intervenir. La gestion de l’anesthésie joue souvent un rôle critique dans l’intervention.

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